Tu le sais dès que tu t’inscris que c’est une mauvaise idée. Tu sais que ça risque d’aller de mal en pis dès ce moment-là, mais tu le fais quand même parce que c’est une expérience, et à quoi servirait un tour du monde si ce n’était pas à te sortir de ta zone de confort? Ben moi, ma zone de confort, elle n’est certainement pas à cheval, mais comme les deux autres fois où j’ai fait de l’équitation se sont bien déroulées, je me console et m’encourage en me disant : « Wow, une promenade à cheval à Mendoza au coucher du soleil. T’es en Argentine ma vieille, y’a pas mieux, allez, hop, un peu de courage, ça va être trop bien! ». Et mes deux Francos-compagnons de voyage me disent la même chose : « Ah, trop bien, ouah… » Ensemble, on s’encourage, aveuglés devant la réalité! Faut pas se leurrer, je commence avec le pire, en bonne Québécoise plaignarde que je suis, mais j’ai adoré l’ensemble de ma soirée. Vous comprendrez mieux plus tard.
Ça commence par un camion qui vient chercher les cinq courageux de l’auberge. Un camion qui ne peut en contenir que quatre. Bon… Ensuite, on arrive à l’écurie qui, soit dit en passant, n’est pas du tout en pleine nature, mais plutôt en bordure de la ville. On attend un peu pendant que les gauchos préparent les chevaux, on a tous ce regard un peu nerveux, vous savez? Celui où on sait qu’on est tous dans le même panier et que si on change d’idée maintenant, on sera LE trouillard de la troupe, LA personne qui n’a pas voulu vivre L’EXPÉRIENCE!
Daniel est le premier à monter son caballo, jusque-là ça va, mais il ne sait pas à ce moment qu’il devra attendre une éternité que les quinze autres montent un à un. Que fait-il pendant ce temps? Il fraternise avec sa monture, ou plutôt, tente de ne pas se faire arracher la tête par les branches de l’arbre sous lequel son cheval insiste pour s’installer.
À mon tour : eh oui, mauvaise idée d’être grasse pour faire de l’équitation. On te donne toujours le mastodonte, le méga-gigacheval-de-la-mort, celui pour lequel il faut disposer d’une échelle pour monter, ce qui ajoute à l’élégance première de monter à cheval en inhabituée, vous imaginez le scénario? Je réussis à ne pas me casser le cou et j’attends moi aussi qu’on trouve un cheval à Déborah. Mais le hic (parce qu’il faut bien qu’il y en ait un, non?), c’est que la bride est trop courte et mon Shrek-poney aime bien grignoter l’herbe au sol, alors je perds toute forme de contrôle sur la belle bestiole chaque fois qu’il penche la tête. Ça ne me rend pas plus nerveuse, ben non, voyons…
On part enfin et je dois l’avouer, tout se passe bien. J’essaie de trouver un rythme fesses-cheval pour ne pas me casser le dos et on s’entend bien tous les deux. Un des gauchos voit bien que je ne suis pas des plus à l’aise, alors il me fait conversation et s’assure que mon cheval ne s’emballe pas. Gracias amigo! Une heure passe, une heure et demie, le soleil se couche et la teinte orange que prend la brousse environnante est plus que jolie. J’essaie de me le rappeler au moindre sourcillement de mon cheval.
Tout à coup, un cheval s’emballe en tête de file. Il rue, couine, ce que vous voudrez comme son. Vous pouvez vous l’imaginer, je CAPOTE. On s’apprêtait à descendre une falaise (bon, une petite côte… okay, okay…) quand l’un des chevaux s’est pris les pattes dans un barbelé au sol et s’est affolé. Les autres ont suivi et pas moyen de passer sans retirer ce qu’il reste de la clôture tombée. On attend patiemment, mais le cheval de Déborah n’a pas du tout aimé voir son ami s’emballer. Il panique, rue, se lève sur ses pattes et ne veut plus rien entendre malgré tout ce qu’elle fait pour l’arrêter et le calmer. Au loin, mon cœur bat la chamade : et si elle tombait? Elle s’accroche de peine et de misère. La situation est maîtrisée par mon courageux gaucho. Me voyant désemparée, il prend mon cheval par le cou pour le faire passer par-dessus les restes de clôture. Je lui en serai éternellement reconnaissant, je ne me voyais pas à la Indiana Jones sur mon étalon blanc.
C’est presque fini et un bon barbecue (avec beaucoup de bon vin!) nous attend, plus qu’une demi-heure, y’a rien là après 2 heures de promenade! Et là, au beau milieu de nulle part surgissent des arbres à pics violents (comme dans les jeux vidéos!) et il semblerait que les guides insistent pour qu’on y passe, puisque tous les chevaux s’y lancent un à un. Rien à faire, il faut simplement éviter du mieux qu’on peut les agressions de la nature. Je me couvre le visage d’une main, mais mes bras et mes jambes accusent le coup. Pas mal semblable au coup que mangerait un 10 roues dans un lave-auto pour Mini Cooper, mettons…
Et c’est là que j’aperçois un beau gros trou dans mon pantalon. Mon seul pantalon noir (quand on part un an, on veut le garder intact son pantalon…) est déchiré, j’ai des égratignures partout, j’ai mal aux mains d’avoir repoussé des branches et, comble de la bonne humeur, les arbres m’ont volé ma montre. On se rendra compte plus tard que Daniel a aussi perdu ses lunettes de soleil dans l’étau. En gros, on pense que c’est un truc pour vider les gringos de leurs possessions pour revenir le soir tout ramasser, ça se peut, non?
Je vous disais que ce n’était pas si pire que ça et je ne vous mentais pas. Hormis les péripéties, on a passé une très belle soirée, parce que dès que j’ai pu débarquer de mon cheval, le sourire m’est revenu, puissance 32, et munie d’un verre de Fernet suivi d’une coupe de vin, tout a semblé redevenir normal. Bizarre, hein? On oublie vite la nervosité préalable.
Un des gauchos a sorti sa guitare et nous a chantonné ça au bord du feu pendant que la viande dorait sur les braises. Une heure plus tard, tout était englouti. Quel festin comme on n’en trouve qu’en Argentine.
De retour à l’auberge, je m’entends dire : « Wow, mais quelle expérience. C’était trop génial! » Ah, le pouvoir de la mémoire sélective!
Avez-vous déjà fait de l’équitation? Comment cela s’est-il passé?
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10 commentaires
Marie-Anne
10 septembre 2013 à 08 h 06Il faut avouer que nos mésaventures font les meilleures histoires! 😉 Merci de t’être “sacrifiée”
Jennifer Doré Dallas
10 septembre 2013 à 12 h 06Oui, c’est souvent vrai! Haha un plaisir 🙂
Françoise
10 septembre 2013 à 09 h 55J’en ai fait une fois dans ma vie et j’ai eu tellement peur que ça c’est arrêté là! Mon cheval a décidé, et je ne sais pas pourquoi, qu’il avait une envie folle de retourner à l’écurie comme ça au grand galop…Une chance, il s’est arrêté à temps mais ce fût trop pour moi… Mais à chaque fois que je vois des gens faire de l’équitation sur une page, je me dis… est-ce que je devrais pas recommencer un jour? J’ai pas encore dit oui!!!
Jennifer Doré Dallas
10 septembre 2013 à 12 h 07Je comprends ta peur, je ne suis pas hyper en confiance sur un cheval, mais je dois avouer que je pense que ça vaut le coup d’essayer de nouveau 🙂
Amandine@Unsacsurledos
16 septembre 2013 à 02 h 41Quelles mésaventures ! Heureusement, comme tu le dis, que la mémoire est sélective, et les souvenirs vallent plus chers au final que les biens matériels 😉 (même si c’est pas la joie en voyage !)
Jennifer Doré Dallas
17 septembre 2013 à 04 h 20Oui, exactement! Maintenant on en rit et de toute façon, j’avais prévu que ma montre ne tiendrait pas tout le voyage 🙂
daniel
11 mars 2014 à 05 h 27et le benteveo vous l’avez entendu mioller dans les arbres ??? cet oiseau m’a acqueillit en ricanant dés que je suis descendu du bus à la station de Capilla del Monte je m’en souviendrais toute ma vie 🙂 par contre à Mendoza carte bleu bloqué j’ai eu la peur de ma vie…
marjomep
1 mars 2015 à 05 h 34Bonjour Jen, je suis actuellement a Buenos Airs et je recherche activement des gauchos a mendoza pour monter a cheval! pourrais tu me filer l’addresse de celle ou vous etes aller? merci d’avance, ton article est genial
Jennifer Doré Dallas
1 mars 2015 à 05 h 52Bonjour! Merci pour tes bons mots!
En fait, ça avait été organisé par l’auberge, donc je ne sais pas le nom exactement, mais si j’étais toi je verrais avec le Hostel Lagares :
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